– Disons que les concurrents de Rollin-Lachenal trouvent ce reflux de fortune assez étonnant. Ils soupçonnent un transfert de fonds douteux, un associé fantôme ou je ne sais quoi encore… Mais, pour l’heure, on ne peut pas tabler sur des « on dit ». Rollin-Lachenal a annoncé au cours de la soirée qu’il prenait 55% des parts de la société Magrot-Tardelli, une entreprise qui commercialise des logiciels d’analyse financière en ligne, enfin un truc pointu... Et ce qu’il y a de sûr, c’est que Magrot et Tardelli ne sont pas les premiers imbéciles venus. S’ils ont accepté le partenariat, c’est qu’ils avaient des raisons de le faire et que, contrairement à ce que pensaient les analystes, Rollin-Lachenal n’était pas sur la paille. Le vieux cheval avait encore des ressources.

– Magrot et Tardelli ont confirmé ?

– Là, il y a comme un problème. Je n’ai pas pu les joindre. Magrot est en vacances aux Seychelles. Son portable ne répond pas. Quant à Tardelli, ce fut un vrai parcours du combattant pour retrouver son adresse. Il ne répond pas au téléphone, il paraît que c’est une habitude chez lui, et vit dans l’appartement d’un de ses amis qui est parti en Amérique du Sud.

– Du suspect ?

– Non, c’est un original. Il ne fait rien pour se cacher. J’ai appelé la poste et j’ai obtenu son adresse sans difficulté. J’envoie un agent de ville frapper à sa porte de temps à autre. Mais pour l’heure, l’appartement est vide.

Darbellay se gargarise avec la dernière gorgée du café infâme qui stagne depuis une demi-heure dans le fond de sa tasse en plastique.

– En attendant, personne n’a confirmé le rachat...

Chappuis qui griffonnait dans son carnet en profite pour refaire surface.

– Si, et devant témoins. Tardelli était présent à la soirée. Rollin-Lachenal lui a demandé de prononcer un petit mot...

– Il était à la soirée et on ne l’a pas interrogé ?