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Chapitre X Épisode 053 |
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– Rollin-Lachenal ? C’était le gestionnaire à l’ancienne, le genre de type qui professait des valeurs immuables sans se rendre compte qu’il était complètement dépassé... – Tu le vois suicidaire ? – Suicidaire, Rollin-Lachenal ? Là, le beaup’ paraît vraiment étonné. Je lui expose ma thèse du mieux possible. Il prend le temps de réfléchir, ce dont je le remercie intérieurement. – On ne peut jamais savoir ce genre de choses, évidemment. Mais je crois qu’il était trop fier de lui. Il s’identifiait à sa banque bien sûr, mais il croyait avant tout à son destin. C’est curieux, il avait ce côté froid, raide, calviniste. Jamais il ne montrait ses émotions et, au fond, il crevait d’orgueil et d’envie de se mettre en avant. – Et la famille ? – Ah, la famille, c’est le fardeau de tout un chacun... Il me regarde droit dans les yeux en disant cela, mais je ne suis pas d’humeur à me laisser entraîner. J’ai les lèvres dans la williamine et je me sens bien. Voyant que ses flèches ne provoquent pas l’ire habituelle, il sourit, et poursuit : – Il a eu de gros problèmes avec les enfants. Enfin, je devrais dire Yvonne a eu de gros problèmes avec les enfants. Rollin-Lachenal se contentait de leur caresser les cheveux quand il donnait une réception. Pour le reste, il n’a jamais été fichu de signer un bulletin scolaire. C’est ça les hommes qui se croient trop important. Mon beaup’ a le regard qui part dans le vide. Sans doute pense-t-il à sa propre jeunesse, à ses mômes qui ne lui parlent plus. Mais il n’a pas l’art de faire durer le trouble, le vieux salaud, il reprend, sur ce ton sentencieux que j’ai tant détesté. – Je ne sais pas si vous êtes allés fouiner dans les instituts privés, mais je crois que du côté des enfants, vous en apprendriez de belles ! – On m’a dit que le fils était un bon à rien... – Tu passerais presque pour un type motivé à côté de lui. Christian, il a tout fait... Dealé un peu de drogue à seize ans, défoncé une ou deux voitures, engrossé une ou deux filles à qui il a fallut payer des avortements discrets. Et toujours Rollin-Lachenal lui sauvait la mise et tentait de mettre une chape de silence là-dessus. Mais Christian a dû faire une connerie plus grosse que les autres. C’est du moins ce qui s’est dit lorsque Rollin-Lachenal l’a envoyé pour trois ans aux États-Unis, dans une université haut de gamme. Christian a été viré en moins de deux. Je crois qu’il n’a jamais réussi un examen de sa vie, cet imbécile-là. Mais Rollin-Lachenal ne voulait pas qu’il revienne... Il y avait sûrement une saleté là-dessous. J’ai sorti un calepin et je prends des notes. – Comment tu sais tout ça, toi ? – Les riches, ça s’emmerde le dimanche. Alors, ça médit. C’est un sport national que de tout savoir sur les emmerdes des voisins. – Et quand il est revenu ? – Toujours aussi glandeur. Rollin-Lachenal l’a tout de même intégré à la banque, bien obligé. Il le présentait à tous comme son successeur. La dynastie, il n’avait que ce mot à la bouche, la dynastie. Tu parles, elle était pourrie sa dynastie et il ne le savait que trop bien ! – Et la fille ? – Sylvia ? Alors là c’est beaucoup plus intéressant ! |
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