Chapitre XI

Épisode 062

Là, ça me frappe comme la foudre. Je me lève et je finis mon verre d’un trait. Pelletier me regarde avec les yeux mi-clos de celui qui a bien bu et à qui on ne la fait plus.

– Dois-je déduire à ton attitude discourtoise que tu te casses ?

– Ouaip ! Et en plus tu paies !

– Tu m’as même pas dit si mon intuition était juste. Il s’est bien suicidé ton gars ?

– Presque. Il a fait encore mieux. Il s’est suicidé à son insu.

Dans la rue, j’essaie de mettre mes idées bout à bout. Le tueur hébergé dans un immeuble appartenant à sa victime. Tout tourne décidément autour de Rollin-Lachenal et de ce crime trop opportun. Et si je ne comprends que trop bien l’utilité qu’il y a à descendre Rollin-Lachenal, je comprends moins pourquoi on s’était attaché à faire disparaître Tardelli.

À Carl-Vogt, c’est justement Tardelli qui est au centre des discussions. On a retrouvé dans le coffre du bureau de Rollin-Lachenal un contrat signé par Tardelli qui semble authentifier le vrai-faux accord annoncé à hauts cris pendant la soirée.

Tarantini était allé le faire authentifier par Hortense Courtois. Mauvaise pioche. Celle-ci jurait ses grands dieux que le contrat était un faux. Tarantini avait envoyé le tout à un expert graphologue.

– Il me dit qu’il me donnera réponse avant la fin du mois ! Tu te rends compte du délai ? Je lui ai dit de faire passer ça en priorité et... T’étais où Joss, d’ailleurs ? Des heures qu’on te cherche.

Je me racle la gorge, le temps d’envoyer ma boîte à idées prendre une livraison rapide de bobards en gros.

– Un interrogatoire avec Darbellay !

– Il peut pas se débrouiller, tout seul, Michel ?... Faudra que je lui en touche deux mots... J’aimerais que tu me dises où on en est avec Scvepic. C’est le bordel ici, y’a rien qui avance !

Je me mets devant l’écran et je tapote un peu en essayant de me donner une contenance. Tarantini regarde par-dessus mon épaule ce que je trouve désagréable au possible. Mais le pire se passe au bout du couloir. J’entends tempêter Darbellay et j’ai comme idée que celui à qui il vient chauffer les oreilles doit me ressembler comme un frère !