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Chapitre XVIII |
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Épisode 094 |
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Trois jours passèrent. Gobert s’occupait à prêter main forte en taverne pour vider livraisons. L’alberguier le payait en nature et la panse du forgeron ne désemplissait pas. Stebouf se révélait meilleur compagnon que l’on pouvait croire au jeu de vide-cruchons et passait de longues heures à boire avec Gobert. Braquemart, quant à lui, restait en retrait, buvait sa honte d’un trait, rotait tristement et s’en retournait broyer du noir, Gabriella à sa suite. - Ce n’est point votre faute, chevalier ! - Une fille ! - Vous ne pouviez point vous douter. - Ma mission est de ramener héritier qui pourra un jour tenir les rênes du Duché d’une main drue. Je ne ramènerai que dauphine que les cousins du Duc ne reconnaîtront jamais. C’est mon honneur qui est ici souillé, Gabriella. Ces jours et nuits que passèrent petit groupe chez Thédania furent bien bruyants : cris de Gabriella retentissaient en nuit car Braquemart, pourtant bien las, n’oubliait pas de prendre épée pour se lustrer légende ; chants que Gobert apprit à Stebouf et aux fortes natures du village, luttaient pourtant bien haut face à manifestations de couche et nul ne savait qui de mélopée de plaisir ou chants paillards faisaient plus fort rougir la lune. Les pleurs que ne retenaient pas toujours Thédania et la petite Lucía, dauphine appelée à retrouver une mère qui ne l’attendait pas, étaient bien discrets en comparaison. Depuis longtemps, Thédania accueillait tous les enfants délaissés du village pour leur apprendre lettres et calcul, offrir pain chaud et tendresse à ceux qui ne connaissaient souvent que taloche, piquette en biberon et travaux aux champs. Elle était vieille fille, mais mère de belle ribambelle qui saurait la consoler du départ de sa préférée, de cette petite Lucía, presque son enfant, dont la mère préférait vivre un destin plutôt que simple vie Au matin du quatrième jour, Gobert se planta face à son compère. Les cernes sous ses yeux et les bouffissures et taches sur son visage témoignaient du long combat mené la veille contre cruchons. - Braquemart, si nous restons encore une journée ici, mon foie explosera. Et je me languis fort de mon Isabelle. Reprenons la route ce jour d’hui. Le chevalier avait les yeux vides. Il se leva sans mot dire. *** Ménotoire leur avait sellé montures. Si le colosse avait retrouvé force en bras et en jambes, sa forte embrassade de mur lui avait quelque peu chamboulé esprits. Il se souvenait de son nom et se rappelait celui de Stebouf, mais pour le reste, éternel sourire lui collait aux lèvres et il obéissait à tout ordre, aussi stupide soit-il. Jeunes du village avait eu idée de lui faire tirer charrue et en avaient conclu que travail de Ménotoire valait celui de deux chevaux de trait. Ils étaient partis peu après midi. Stebouf chevauchait devant. Gobert avait pris Lucía en croupe et lui faisait boire en cachette bonnes golées de piquette pour qu’elle cesse de chouiner bêtement. Braquemart fermait la marche, Gabriella accrochée à sa taille. - Vous faites bien triste figure, chevalier. - Cet héritier qui n’est qu’héritière ne me quitte pas l’esprit, je vous l’avoue bien volontiers. Même en lui coupant les cheveux et en la grimant, il ne lui poussera point vit en arrivant sur terre de France. - Ça, ce n’est pas sûr. - Que voulez-vous dire ? - Il se trouve Alphagor, que j’ai peut-être idée qui vous tirerait de pétrin. |
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Gros lolos, mâles au dos. | ||||
© Cousu Mouche, 2006-2007, tous droits réservés |
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