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Chapitre XIX |
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Épisode 098 |
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Miens cousins, Je n’utiliserai point vos titres pour m’adresser à vous, car événements que me narra le vaillant chevalier Alphagor Bourbier de Montcon, chargé par mes soins de ramener fils mien en études en Italie, me démontrèrent que loi de lignage et fidélité familiale n’étaient point de vos préoccupations et que votre honneur avait sans doute disparu quelque part en votre fondement, me délivrant ainsi de toute obligation de convenances. Ma porte vous est fermée à jamais, et vous n’entrerez en château qu’au soir où, peu avant de me rendre à Dieu, j’abdiquerai pour mon fils et m’offrirai dernier plaisir sur terre à vous voir, mine déconfite et sourire hypocrite, ployer le genou pour lui jurer allégeance, fidélité et amour. Qu’il me soit permis de vous adresser mon infini mépris et que loisir me soit donné de vous châtier comme il convient. De ce jour, vos sobriquets s’unifieront pour devenir Fustironcle et Fargerand les escouillés. Votre dévoué Freuguel Childeric de Minnetoy - Corbières *** Camilla Clotilda replia la lettre avec moue de satisfaction. - Vous avez rédigé cela vous même, mon ami? - Non. Je l’ai fait écrire par Martingale. Il avait d’ailleurs un air plus renfrogné encore que d’ordinaire alors qu’il transcrivait missive. Il est insupportable d’être pareillement terne alors que tout Minnetoy-Corbières est en joie ! - Peut-être conviendrait-il de lui trouver femme. - Femme ? À ce nabot parfumé? Je trouverais gâchis de lui livrer dernière de mes servantes ! Je le soupçonne même de préférer braies à jupons. En rare élan de tendresse, Camilla-Clotilda s’accrocha au bras du duc. - Il y a fort longtemps que je ne vous avais vu en forme si réjouissante mon ami. Le duc parut réfléchir à la question avant de répondre. - Oui, je vais bien, ma belle. Je n’irai certes pas jusqu’à dire qu’avoir fils provoque autant d’aise qu’avoir couilles, mais cela aide fort à en supporter absence. - Et comment avez-vous récompensé le chevalier de Montcon ? - J’ai fait rouler un tonneau de vin vieux et fort jusqu’à cette taverne où il semble avoir ses quartiers. Avec ses compères, même en buvant sec et sans discontinuer, ils devraient en avoir jusqu’à l’aube. Un page frappa discrètement à la porte et entra sur la pointe des pieds. Dans le corridor, on entendait les hurlements d’une servante et les rires de Firmin-Léandre. Le page referma. - Messire, un émissaire du chevalier de Montcon est en bas. Il vous remercie bien bas de votre tonneau et demande si ce pourrait être un effet de votre bonté de leur faire rouler le grand frère ? - Ils ont tout bu !? - Ce me semble. - Mais le soleil vient à peine de se coucher ! Il faut que je voie ça ! |
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Quand j’ai bu, j’bois double. | ||||
© Cousu Mouche, 2006-2007, tous droits réservés |
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