Chapitre II
 
     
 
Épisode 004
 
     
 

- C’est parfait, tout est parfait. Claude, vous êtes merveilleuse, une fois de plus ce vernissage est une réussite.

- Merci Edouard. Mais je n’ai pas fait grand-chose. Les clients sont venus admirer vos tableaux, ils sont magnifiques. Vous avez fait un excellent choix pour l’accrochage. Sobre, mais efficace. Le Monet est une pièce exceptionnelle. Il rayonne tout en mettant en valeur les autres ouvres.

- Je suis content que cela vous plaise. Votre avis m’est toujours précieux. D’autant plus que cet après-midi, ma femme a.

- Edouard, j’adore votre exposition, voyez-vous je .

Claude regarda s’éloigner son ami happé par une cliente. Une femme insignifiante, frivole et très riche qui avait décidé, il y a quelques mois, de s’intéresser à l’art. Non pas par intérêt personnel mais par snobisme.

Elle avait soif. Claude se dirigea vers le buffet et demanda un verre d’eau. Ce soir, le mari de Carmen donnait un coup de main pour assurer le service. Bel homme, noiraud. Pendant qu’il remplissait son verre, leurs regards se croisèrent. Une fois de plus, Claude fut surprise par l’éclat de ses yeux. Raoul avait des yeux extraordinaires, vert clair pailletés de jaune. Il lui tendit son verre en souriant. C’était une belle soirée, n’est-ce pas ?

Elle n’eut pas le temps de répondre. Florence la saisit par le bras et l’attira dans le couloir.

- Tout est prêt ?

- Oui, il reste juste à allumer les bougies.

Florence jubilait.

- Merveilleux. Edouard va être enchanté.

Claude resta silencieuse, elle ne voulait pas gâcher l’enthousiasme de son amie. Pourtant, elle redoutait la réaction d’Edouard. Il n’aimait pas les anniversaires. Plus particulièrement le sien. Le temps passait pour tout le monde, mais elle soupçonnait qu’Edouard aurait préféré qu’il s’arrête un moment pour lui. D’ailleurs, elle ne connaissait pas son âge exact. Entre cinquante et soixante ans . plutôt soixante.

Elle suivit Florence et se retrouva dans la petite cuisine attenante aux salles d’exposition. Un énorme carton trônait parmi les emballages du traiteur. Claude souleva le couvercle pour permettre à Florence de savourer la surprise.

- Il est magnifique, splendide. Elle gloussa. Presque aussi beau que l’original ! Regardez la délicatesse de ces nénuphars.

Le ton ravi de Florence balaya ses appréhensions. D’ailleurs, ce gâteau n’était pas si laid. Il était juste déplacé. La base était constituée d’une couche de crème blanche étalée en vaguelettes irrégulières. Un étang, pensa Claude. Eparpillées sur cette eau, des dizaines de fleurs en massepain rose stagnaient sur des grosses feuilles en pâte d’amande vert pomme. Finalement, ce n’était qu’une version de plus des Nymphéas de Monet, une version comestible.

Tout excitée Florence lui demanda d’allumer les bougies.

- Trois, ce sera suffisant, n’est-ce pas ? Inutile de masquer cette merveille et d’embarrasser Edouard en lui rappelant son âge. Occupez-vous du gâteau. De mon côté je vais aller rassembler nos invités dans la grande salle.

Restée seule, Claude disposa les bougies et se mit à fouiller la cuisine. Elle se souvenait d’avoir vu un paquet d’allumettes dans l’armoire, mais il n’y était plus. Peut-être sur le rayon du haut. Elle saisit une chaise et grimpa dessus.