- Vous pouvez rentrer chez vous, Céline, je fermerai le cabinet.

David Forestier avait hâte de se retrouver seul dans le calme de son bureau. La visite à Aurélie lui avait fait prendre du retard dans ses consultations et certains de ses patients ne supportaient pas d’attendre. Sa réputation lui valait une clientèle fortunée qui estimait humiliant de patienter dans une salle commune. D’ailleurs aujourd’hui, certains d’entre eux lui avaient rappelé qu’il n’était pas le seul médecin du quartier et que rien ne les empêcherait d’aller voir ailleurs s’il continuait à avoir du retard dans ses consultations.

Ces derniers temps, il supportait mal le comportement de ses riches patients. Lorsqu’il était chef de clinique à l’hôpital le travail était éprouvant, mais au moins il avait l’impression d’exister dans sa profession, de servir à quelque chose. Il s’approcha d’un petit meuble en bois dissimulé derrière son bureau et prit une bouteille de whisky. Ce n’était pas encore l’heure de l’apéritif, mais il avait besoin d’un remontant pour affronter la soirée. Son père et sa belle-mère l’avaient invité à un gala de charité. Quand il avait demandé à son père de quelle ouvre il s’agissait, il lui avait dit : « Quelle importance, ce n’est pas le plat qui compte, c’est la saveur du mets qu’il contient ». Son père avait toujours été snob et avec l’âge, ça s’empirait.

Tout en savourant son whisky, David pensa à Claude. Il lui avait téléphoné cet après-midi pour prendre des nouvelles d’Aurélie et pour lui proposer de l’accompagner à la soirée de gala. Comme il s’y attendait, elle avait refusé prétextant vouloir rester auprès de sa fille. Alors, il l’avait invité à dîner le lendemain soir. Une impulsion. Elle avait accepté.

Sans hésiter, il se servit un second verre, il fallait bien fêter ça.