![]() |
||||
Chapitre IX |
||||
Épisode 037 |
||||
Blotti dans la pénombre de l’entrée, Robin observait l’assemblée. Les invités avaient mis le paquet. Apparence chic avec un rien de fantaisie. Envie de se distinguer, mais obsession d’être pareil pour se faire accepter dans le cercle des élus. Depuis sa nomination, Robin devait faire acte de présence lors de ces réceptions mondaines. Au début de son mandat, il avait réussi à se soustraire à cette corvée en prétextant des excuses pertinentes, mais depuis quelques mois, son stock d’excuses était tari, à moins que ce soit son stock de pertinence. Comme il n’arrivait pas à se décider à entrer dans l’arène, il se planta devant un miroir pour examiner le noud de sa cravate. Il s’était habillé en hâte et ça se voyait. Sa chemise dépassait sur la gauche de son pantalon lui donnant l’air de sortir des toilettes, son costume bleu marine semblait encore pleurer le mort de son dernier enterrement et ses chaussures transpiraient le vieux cirage. Robin lissa les manches de sa veste pour enlever les poils roux déposés par son chat et d’un geste machinal se passa la main dans les cheveux ce qui anéantit ses efforts de coiffure. Il s’éloigna du miroir et guigna à travers la tenture qui séparait l’entrée de la grande salle. De son poste d’observation, il ne pouvait pas voir l’estrade, mais, par contre, il entendait distinctement le discours de son chef. C’était un as des discours. Parfois, les gens l’invitaient juste pour le faire parler. Il aurait fait un excellent vendeur. Bonne présentation, belle voix grave, paroles convaincantes, et une petite touche d’émotion qui achevait de faire craquer le consommateur. Ce soir, tous ces braves gens se délesteraient de quelques gros billets sans même se souvenir pourquoi. Des applaudissements fusèrent, Porchet avait fini son numéro. Robin se dit qu’il allait saluer son chef et son devoir accompli, il s’éclipserait en évitant les visages connus. Robin repéra son chef au fond de la salle. Il discutait avec un couple. Robin se dirigea vers eux, mais en se rapprochant il reconnut Florence et Edouard Maudet. Préférant les éviter, il changea de direction et se retrouva dans un petit couloir qui, visiblement, menait aux toilettes. Lorsque des notes de musique de la grande salle, il décida de sortir de son trou. Les invités iraient danser et il pourrait saluer son chef. Il regarda discrètement dans sa direction et vit qu’il était encore en train de discuter avec les Maudet. Non, juste avec Edouard. Florence avait dû trouver un prétexte pour laisser les deux hommes entre eux. Alors, il la vit. Elle se dirigeait droit sur lui. Robin tira ses manches pour se donner une contenance et marcha lentement à sa rencontre affichant un air détaché, se préparant à jouer l’effet de surprise. Mais Florence s’était arrêtée à mi-chemin. Elle semblait malade. Au moment où Robin se précipitait pour l’empêcher de tomber, un homme l’attrapa par le bras et la fit s’asseoir sur un coin de table. Légèrement vexé, Robin se dit que la belle Florence n’avait pas besoin de lui et il décida de déguerpir sans se faire remarquer. Quelques minutes plus tard, il sautillait entre les flaques pour éviter d’inonder ses chaussures en cuir. En sortant, il avait croisé Philippe Montfort et le toubib d’Aurélie. Le banquier semblait furieux et agitait un index menaçant sous le nez du médecin qui se déroba sans répondre. Absorbés par leur discussion, ils ne l’avaient pas remarqué. |
||||
© Cousu Mouche, 2007-2008, tous droits réservés. |
||||
![]() |