Chapitre XV
 
     
 
Épisode 072
 
     
 

Florence s’arracha au confort du lit et se planta devant sa penderie. Des dizaines de tailleurs, robes, manteaux ronronnèrent sous ses caresses. Des tissus soyeux débordaient des tiroirs. Avec un petit pincement au coeur, elle contempla sa collection de chaussures soigneusement organisée dans des compartiments faits sur mesure. Elle devait tout abandonner. Une colère sourde la parcourut en pensant à ce gâchis. Elle avait supporté Edouard pendant toutes ces années, elle méritait ces belles choses, elles étaient à elle ! Et pas encore partie elle les regrettait déjà.

Mais Richard avait raison, elle devait s’enfuir, rompre brutalement avec son ancienne vie. Sinon, elle n’aurait jamais le courage de partir. Edouard trouverait les mots pour la faire rester. Il lui parlerait de tout ce qu’elle allait perdre, du luxe qu’elle adorait et que Richard ne pourrait pas lui offrir. Il lui dirait qu’il l’aimait, qu’il avait besoin d’elle pour exister. Il insisterait, deviendrait tendre, attentionné, la couvrirait de cadeaux. Et il gagnerait, comme toujours.

Florence referma l’armoire en soupirant. Richard avait une bonne situation, une belle voiture, mais il ne serait jamais riche. Tant pis. Elle s’habituerait à vivre plus simplement. Pendant le quart d’heure qui suivit, elle emballa soigneusement ses bijoux dans sa plus belle robe de soirée et glissa le tout dans un grand sac à main. Richard lui avait déconseillé de les prendre mais c’était au-dessus de ses forces. Elle le lui dirait quand ils seraient partis. En voyant la beauté des pierres précieuses, il comprendrait.

Avant de sortir, Florence arpenta l’appartement pour lui faire ses adieux. Elle contempla tous ces beaux meubles qu’elle avait choisis avec soin et qu’elle ne reverrait jamais. Tout en caressant les tentures, elle pensa à Richard. Il venait de lui donner les détails de leur fuite. A onze heures il l’attendrait dans sa Jaguar devant l’entrée de son immeuble. Elle lui donnerait sa valise, elle n’allait pas la trimbaler avec elle à la galerie. Ce soir, vers vingt-et-une heures, il viendrait à la vente. En tant que client de la galerie, il avait reçu une invitation. Plus tard, en fin de soirée, elle parlerait à Edouard.

Ensuite, elle partirait. Richard l’attendrait dans la ruelle voisine. Et tout serait terminé.

Sauf qu’elle n’aurait jamais le courage de parler à Edouard.

Elle allait lui écrire une lettre pour lui expliquer. Son regard rencontra celui du cadran de l’horloge du salon. Elle avait trente minutes pour rédiger sa lettre.