Chapitre XXI
 
     
 
Épisode 098
 
     
 

La balle l’a frôlé. Il se lève d’un coup, l’instinct de survie. Etonnant pour quelqu’un qui n’a plus rien à perdre. Raoul le voit. Il détourne le pistolet de Norbert et le pointe dans sa direction.

– Désolé de t’avoir réveillé. Mais t’inquiète pas, tu vas bientôt pouvoir te rendormir.

Edouard n’a pas peur, il sait qu’il va mourir.

La voix de Norbert lui parvient, lointaine.

– Raoul, laisse-le. On va s’arrêter et le poser au bord de la route. Il ne nous a jamais vus, et nous non plus. N’est-ce pas, dites-lui !

La voix est suppliante, Norbert veut le sauver, il croit que c’est un honnête homme pris au piège par un fou. Il ne sait pas que c’est un meurtrier qui a tué de sang froid. Edouard ne dit rien. Il regarde le pistolet de Raoul, un vieux Smith & Weston avec des traces de rouille sur le canon. Dommage de se faire descendre par une arme aussi mal entretenue.

– Laisse-le !

Norbert s’est redressé et pointe un flingue vers Raoul qui se met à rire.

– Le petit flic se décide enfin à sortir l’artillerie. On va voir ce que t’as appris dans ton école.

Il bondit et saisit Norbert par le poignet.

– Lâche ce joujou !

Mais Norbert ne le lâche pas, il s’accroche à son arme. Quel idiot. Raoul doit avoir raison, c’est sûrement un flic pour être aussi con.

La voiture se met à zigzaguer sur la route. Les deux hommes s’agrippent en poussant des cris de bêtes sauvages. Des coups de feu. Deux. Et puis la lumière des phares. Edouard est calme. Il voit le camion émerger du brouillard.

Un quarante tonnes.

En pleine nuit.

Qui leur fonce dedans.

Etrange.

Et plus rien, juste des éclats de lumière vive qui envahissent son âme déjà morte.