Ceux de Corneauduc

Vingt-troisième épisode

Chapitre VII

Les relations d’Achille et du Duc de Minnetoy-Corbières n’étaient pas nées sous de bons auspices... Achille était alors un petit marcassin perdu, gémissant sa faim, pleurant sa mère au pied d’un orme, lorsque la flèche du Duc vint se ficher juste au-dessus de lui.

La forêt branla alors au vent d’un juron : « Fichtrecrottin de broutelégume ! Suis-je donc manchot, suis-je donc aveugle, serais-je devenu manant sans le savoir, pour que ma flèche ne suive plus même mes ordres ? » Le Duc était rouge de confusion, mais sa colère bouillonnante n’était rien à côté du cri qui monta des enfers et, dit-on, déracina quelques chênes de beau gabarit et provoqua surdité de moult rabatteurs.

– Nooonononononononononoonnnnnn !!!

Le Duc rangea sa flèche dans son carquois et soupira jusqu’au cœur. Pourquoi donc avait-il initié la mariée, la toute jeune Duchesse, au mâle plaisir de la chasse ? Dans l’intention sans doute de bomber le torse plus que de raison ; afin de montrer à celle qui ne s’était point encore offerte que sa flèche savait percer les cœurs et que sa main grossière ne tremblait pas.

Et voilà que la fraîche et bien dotée Duchesse sautait de cheval avec des larmes en arc-en-ciel autour des yeux, qu’elle prenait le marcassin dans ses bras comme elle l’aurait fait d’un nourrisson et qu’elle jurait qu’elle vivante nul ne prendrait la vie de cet adorable petit cochon.

L’adorable petit cochon grogna de contentement et le Duc lui tira fort peu courtoisement la langue. N’importe, il céderait lui aussi au charme d’Achille.

Achille trottait, crottait, geignait partout dans le donjon et, quand par malheur le Duc rentrait bredouille d’une partie de chasse, le sanglier ne s’en tirait pas sans un coup de botte ducal dans son porcin postérieur.

Mais ses accès de groingoins chagrins attiraient la Duchesse plus sûrement que le rut du Duc. Au point qu’Achille en vint à prendre couche sur la peau d’ours au pied de l’auguste lit où les Minnetoy-Corbières concevaient descendance depuis que Dieu tout puissant les avait désignés suzerains du Duché.

Les relations du Duc et d’Achille n’étaient alors guère meilleures que celle des Roys de France et d’Angleterre. Dans ses mauvais sommeils, le Duc rêvait même de serrer l’animal à la gorge et de le noyer dans la douve.

Il aurait sans doute chargé Martingale de le faire si ses relations envers sa jeune épouse ne s’étaient soudainement embellies du fait même de la présence d’Achille. Quand le Duc besognait, l’œil épais et le fondement sans entrain, refroidi par l’inertie de sa compagne qui ne réagissait point à ses initiatives, bestiales souvent, un peu simplettes toujours, mais qui n’avaient d’autre but que de faire plaisir, Achille se prit, on ne sait pourquoi, à grogner en cadence. Et miracle, la Duchesse bougea enfin. Le monde se parsema d’étoiles troubles. La chambre, le lit, le château tremblaient. Les cris ducaux se mêlaient aux grognements du sanglier sans qu’on pût distinguer les uns des autres.

 
 

Peut-on remonter dans l’estime de quelqu’un sans l’avoir déçu ?
Disent-elles que la poire c’est Sacha ?
Arthur Rimbaud offense-t-il le mur des vieilles filles ?
A Cannes, quel cachet reçoit un con primé ?
L’épisode aime-t-il son prochain ?