Ceux de Corneauduc

Trente-quatrième épisode

Chapitre IX

Camilla Clotilda de Capodistria naquit en noble famille italienne, désargentée mais férue d’art, aimant sculpture grecque et vase romain, belles conversations et douces philosophies. Enfant, elle entendait attristée, apeurée, les vagissements de ces barbares du Nord, incultes, qui priaient un Dieu de colère dans des églises sans grâce.

Elle était galante, raffinée, intelligente. Mais les finances de son père ne lui permettaient guère d’espérer beau parti parmi ces Marquis, ces Barons, voire même ces riches familles de bourgeois dont elle détournait les fils, pour un peu de bonheur, point pour une vie.

Camilla Clotilda savait qu’elle ne ferait pas mariage d’amour. Et quand ce rustre baveux de Minnetoy-Corbières descendit en Sud pour prendre compagne à sa pogne, elle surmonta bravement son dégoût, se laissa pilonner à la couche.

De lui, elle ne voulait que le domaine et les caisses. Il serait l’époux qu’on envoie à la guerre. Sur place, elle comprit vite que les cousins du Duc la voyaient d’un mauvais œil, que sans héritier légitime elle serait renvoyée à son père sitôt le Duc trépassé. Il fallait enfanter pour prendre le pouvoir, pour se débarrasser du poisseux époux. Mais enfanter du Duc, elle ne pouvait s’y résoudre.
Aussi, elle endura le morne château, le donjon froid, et les effluves tenaces de son mari, en se montrant aussi peu conjugale que possible. Quelques galants de passage lui adoucirent quelque peu la vie. Et puis, ce fut le Baron du Rang Dévaux. Il n’était point courtois et raffiné comme on l’était en Italie, mais il remplaçait avantageusement les mains râpeuses du Duc. De lui, elle pouvait imaginer enfanter. Sans le lui dire bien sûr. Le cœur de Camilla Clotilda n’aimait plus depuis bien longtemps.

Elle allait donc se donner en forêt, priant pour que son ventre s’arrondisse. Ensuite, elle n’en doutait point, elle trouverait moyen de se débarrasser prestement de son rustre époux.

Mais voici que le Duc part en guerre contre le seul géniteur potable de la contrée, alors que trois semaines auparavant, comme chaque lune, ses espoirs d’enfantement s’étaient écoulés d’elle, se mêlant au sang épais qui lui poisse le cœur autant que la chair. Elle voit s’étendre sur ses jours la silhouette suante et triomphante de son mari... Comment diable ce gros rustaud avait-il pu mettre à jour sa liaison ? Il y avait incontestablement du Martingale là-dessous.

Mais le plus pressant pour Camilla est d’empêcher cette guerre. Sauver son amant pour quelques mois, le temps qu’il se rende utile. Après, il sera toujours temps de remettre une pincée de poudre aux yeux à son mari et de se débarrasser de cette intrigante vipère de conseiller ; qu’il crève la gueule ouverte, ce rat puant !

 
 

Bouddha peste-t-il quand on grille ?
Si vous preniez vos affaires en mer, pourriez-vous faire un tri marrant ?
Treize envie de toi ?
Si être en taule est une tuile, me feras-tu une place sous ton toit ?
En Montaigne, le pro chaîne-t-il l’épisode ?