Ceux de Corneauduc

Trente-huitième épisode

Chapitre X

Le soleil a délaissé le zénith depuis longtemps ; Gobert et Alphagor sont toujours sur la route, la langue lourde d’avoir trop peu bu, le cul malmené par le dos ossu de leur monture. Le lent défilement de la contrée les berce et la somnolence les aurait gagnés depuis longtemps si la mule ne boitait autant.

– Il me semble que nous n’avançons plus guère, mon vieux Ventrapinte.

– Alors il est quatre heures, en déduit Luret.

– Comment quatre heures ? Que me chantes-tu là, crapaud bègue ?

– C’est l’heure de la sieste de Bourrue. Et comme tu le sais, mule qui dort ne marche point.

– Mais fouette donc cette vieille carne, s’insurge Braquemart en tapant dru des talons contre les flancs de l’animal !

– Arrête donc, malheureux ! Mule qui boude marche encore moins...

– Mais agis donc, Gobert ! La Duchesse nous distance. Elle va disparaître à nos yeux. Quelle escorte sommes-nous donc ?

– La mule dodeline de la tête, doucement, laissant les herbes grasses lui chatouiller les naseaux.

– Bourrue ne dormira guère longtemps, Braquemart ; profitons-en vite pour éteindre ce brasier qui brûle la gorge pis que forge.

***

Émile la besogne et Raoul le rugueux dorment, le couteau sur la panse et le fromage mollissant entre les molaires. Ils ronflaient muguets et pâquerettes quand une image de bourse pleine vient se mêler aux fleurs de leur rêves.

– As-tu ouï ?

– Oui, j’ai ouï.

– Sabots résonnent sur le sentier...

– Il y a aura bonne bourse à détrousser...

– Et jupon à retrousser, si j’en crois mon œil averti qui dispense l’autre de s’ouvrir.

Et, arme au poing, ils jaillissent de leur cachette en hurlant :

– Hardi ! Sus ! Hardi ! Hardi !

Le cheval affolé se cabre sous la Duchesse qui, habile cavalière, garde posture sur le sursaut de sa monture.

– Que me voulez-vous, vils filous ?

Les deux brigands la considèrent, l’œil égrillard.

– Ta bourse pour nous et les nôtres pour toi !

– Je n’ai point de bourse mais je suis suzeraine. Écartez-vous, manants, mes affaires vous dépassent !

Les brigands rotent un peu, ébranlés par tant d’aplomb.

– Nous sommes trente en buisson, vous n’avez aucune chance !

– Que nenni, galapians, mon escorte arrive. Elle a si fière allure que vous prendrez la fuite avant de l’avoir vue !

 
 

Taper des talons fait-il de la mule un destrier ?
Combien de livres au salon du litres pour écrire cet épisode ?
Est-ce qu’Al ment à Jeanne pour l’endormir ?
A-t-il été déféré au parquet parce qu’il fumait la moquette ?
Va-t-on sauter le prochain épisode ?