Ceux de Corneauduc

Soixante et unième épisode

Chapitre XIII

Alcyde Petitpont, un lourd jambon sur l’épaule, referme la porte de sa maison. Il s’assied sur sa charrette entre cageots et sacs de victuailles. Il y a moult lieues à parcourir d’ici à la Baronnie du Rang Dévaux et il ne serait pas bon de manquer de quoi s’emplir panse. Un petit tonnelet de vieille prune, miraculeusement sauvé du désastre, est blottit entre deux sacs de farine. Alphagor et Gobert doivent en être déjà à lécher le fond de leurs outres... et il faut bien les avertir que le sombre intrigant s’est enfui du moulin.

Il se saisit d’une gourde et se rince le palais à l’eau de source pour se fouetter les sens et se donner envie de légumes frais et de viande fumée. Il claque la langue et Victor, son vieux et robuste cheval, s’ébranle au pas, au petit pas. Jamais Petitpont ne le fouette pour aller plus vite et jamais ne songerait à le faire.

– C’en est à se demander si ta carne sait trotter, ricanait Braquemart aux heures de moqueries.

– Il sait sans doute, répondait Alcyde. Et, plus important, il sait tenir ligne droite, ce dont ton pauvre Lucien est bien incapable depuis qu’il boit à même bassine que toi.

Le meunier sourit à cette évocation en se coupant tranche de jambon tandis que la charrette s’éloigne lentement de sa colline. Il se retourne pour regarder son moulin qui se découpe sur le ciel de ce matin naissant. Il est loin le temps où, nouveau dans le pays, il parcourait des lieues par jour pour vendre ses bras aux paysans. Et, après avoir enterré la moitié de son âme, il avait vu trop de choses qui lui avaient laissé les yeux remplis jusqu’au bord pour qu’il ait encore envie de battre campagne. N’était de ces deux forts braillards, il n’aurait pas quitté demeure alors que compote encore chaude attendait d’être mise en pot. Mais leur amitié lui enduisait le cœur d’un baume et ses deux amis devaient commencer à éprouver rude soif en ce péril qui les menaçait.

Un cri au loin le tire de rêverie. Il semble bien qu’on le hèle de par la colline. Il se retourne pour apercevoir une tête rousse qui dévale la route sur un fort destrier. Un garde du château.

– Ohé ! Maître Petitpont !

Alcyde s’arrête et attend. Ce jeune homme galope comme poursuivi par horde de loups.

Guillaume Bouilluc arrive le visage en feu et immobilise avec peine son cheval tout contre la charrette. La monture fume de sa longue course et souffle fort des naseaux alors que Guillaume s’essuie le front d’un revers de manche.

 
 

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