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Can’t Help Falling in Love – Elvis Presley

 

Ah, inoubliable, mythique Elvis ! D’aucuns se rappelleront son incroyable mèche, d’autres sont inimitable dégaine, d’autres, encore, ses innombrables conquêtes. Certains ricaneront du manque d’originalité des cinéastes américains, qui ressortent ses chansons à tout-va dans les bande sons de leurs films. Can’t help falling in love with you n’y fait pas exception. Les paroles font un peu sourire au vu des idylles tumultueuses du larron.  Je ne peux pas m’empêcher de tomber amoureux de toi, bien avant que la lune ne tourne au fiel. Dès les premières notes de piano, ça pue le pathos : une touche risque de se détacher sous l’excès sentimental. La voix du King tremble comme un patient atteint de la maladie de Parkinson, un chœur donne du « ouh ouh ouh », tout est accordé pour nous piquer le coin des yeux.

Et pourtant, tout ce lyrisme traduit bien l’intensité du sentiment amoureux, sa force, son absurdité, aussi, puisque tout le monde doit tôt ou tard se dire adieu. Wise men say only fools rush in : c’est sûr, ils nous avaient prévenu, les sages, de ne pas y foncer tête baissée. Peut-être qu’ils ont la langue aride, qu’ils n’ont jamais été assez humain pour mettre toute la mise, comme au poker : I am all in. Aimer quelqu’un d’autre, quelle connerie ! Et ça se dit sage ! Non, la sagesse, c’est la folie d’écouter les paroles d’Elvis et d’oser se dire, peut-être que comme un fleuve qui s’écoule jusque dans la mer, certaines choses doivent arriver. Après tout, c’est le roi qui l’a dit.

Alors, même si on sait que le destin n’est qu’une invention des astrologues, que tout finit par mourir, on se laisse entraîner par la voix d’Elvis et ses vibratos, en emmerdant les sages et les cyniques. On s’en moque, l’amour, ça ne s’embarrasse pas de concession, c’est beau, grand, démesuré, et tant pis pour ceux qui diront le contraire. Et on se tourne vers l’autre, avant que la chanson se termine, le temps de dire : tiens, prends ma main et, pendant qu’on y est, prends toute ma vie aussi.