Quatre heure dix, l’heure avant l’aube du jour suivant, le moment rêvé pour se pendre.
On fait moins les petits malins au petit matin quand on a l’œil vitreux au fond de son miroir et juste l’envie de s’effacer jusqu’à la dernière trace.
Tu cherches un lambeau de sens auquel te raccrocher, en regardant ton futur s’effilocher. Tu te regardes dans le passé, ton horizon tu l’as broyé.
Tu parles de la vie comme d’une foire, une galerie, une exposition, tu parles d’une vie en société qui formate nos ambitions. On n’est rien sans les autres et si peu soi devant eux.
Passez, dépassez, trépassez, il n’y a rien à voir, plus rien à exposer dans la galerie des sentiments, tu laisses ta place aux nouveau-nés sur le marché des morts-vivants.
Un employé des pompes funèbres pour partager ta dernière bière, la solitude n’est plus une maladie honteuse, tu le dis dans une autre chanson, mais dans l’ultime chapelle, elle interpelle, quand le silence l’amplifie.
Le spectacle doit continuer, mais ce sera sans toi, tu es trop artiste pour tous ces compromis. Trop intègre pour le jeu des politesses.
L’orgue joue pour un seul défunt, hommage d’une société en capilotage automatique.
Ton corps sur le billard, tout tourneboulé, tu fais peine à voir, tu voudrais tant avoir été.
Pourtant je reprendrais bien un supplément de mensonge, si c’est ta tournée.
L’heure avant l’aube du jour suivant pèse une éternité. Tu n’es que le figurant de ta propre destinée, avec ton mal-être plaqué au corps, ton ironie à fleur de peau.
Dans un engrenage sans issue, comme un coup de massue, point de jour à l’horizon, il y a de quoi perdre la raison. La folie, c’est tout ce qu’il te reste, et dans ton miroir, la gueule trop familière du désespoir, désabusé par tant d’abus, d’obus, d’obtus.
Qu’il est lourd le poids des jours, l’impression de tourner en rond, quand rien ne filtre dans l’angle mort sur cette autoroute sans retour.
A Quatre heure dix, tes mots Hubert, percutent mes états d’âme comme un appel de phare qui m’en met plein la vue.
Mais ton désespoir enrichit le mien. Si c’est toi qui régales, je reprendrais bien… un supplément de mensonge.
Sabine Dormond
Merci pour ton beau texte sur cette belle chanson de Thiéfaine.
Il semble que votre commentaire ait mis cinq ans à me parvenir à la faveur d’un commentaire plus récent. Preuve que ce site est vivant. J’espère que mes remerciements trouveront un chemin plus rapide jusqu’à vous
Bravo, c’est très beau ce dialogue à hauteur de gemellité ou de sympathie avec H.F.T. dans ce drôle de voyage
Merci Le Hir. Par les miracles de l’informatique, je découvre votre commentaire aujourd’hui et me sens jumelle avec vous aussi par la force de l’empathie inspirée par HFT
Comme chacun prend ce qu’il veut dans une chanson et c’est là la beauté de la chose… personnellement pour avoir été insomniaque et l’esprit torturé je vois le texte plus « premier degré « . L’angoisse de la nuit… surtout quand le jour va se lever… cet instant particulier génère un sentiment unique. Et la sensation renforcée de ne pas appartenir au monde qui nous entoure. Où nos angoisses de ne plus avoir d’avenir ni de place parmi ce monde paraît tellement évident. Cette heure cruciale de la nuit où le désespoir atteint son paroxysme. Et enfin le jour se lève….
Merci pour votre commentaire et navrée d’avoir tant tardé à y répondre. C’est si parlant pourtant cette angoisse que vous évoquez, exacerbée par les ténèbres et le silence d’avant l’aube et cet état particulier dans lequel ils nous plongent. En pensée avec vous à cette heure où l’on est si fragile
Merci. Mon coeur parle . Mes mots sont silencieux. Il faut seulement fermer les yeux et écouter. Alors les mots s’animent et se font chant.