Parce que les « (…)adipeux en sueur bouffeurs d’espoir qui vous montrent du nez » sont là, toujours présents dans nos vies. Parce que ce seul vers le justifie, d’ailleurs. Parce qu’elle est surannée et pourtant indémodable. Parce que Jacques, bien entendu.
Parce qu’il est le papa qu’on aime détester et qu’on déteste aimer avec ses guturaux 17 rrrrrrrrr à chaque mot ou fin de phrase. Parce que ce monolithe est magnifique mais aussi ô combien pesant pour qui veut se lancer dans le périlleux exercice du métier de la chanson en tant que belge. Parce qu’on baptise si facilement ses prétendus héritiers artistiques. Parce que Bécaud. Parce qu’à chaque fois que cette foutue chanson passe à la radio, c’est la seule que je réécoute avec plaisir, comme pour la toute première fois.
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Eternal (Dreams Pt. II) – Solitude Aeturnus
Une intro lente au son lointain, comme si les musiciens s’étaient enfermés dans une cannette de Bud, on se demande bien pourquoi. C’est pour rappeler aux fans, peu nombreux, la fin d’un morceau figurant sur l’album précédent. Il s’agit là d’une trilogie doom sur les malheurs que peuvent provoquer l’immortalité, sans référence à un quelconque comédien strabique. Certaines personnes ont le temps de réfléchir à des thèmes vraiment importants. Mais nous n’allons pas nous pencher sur les textes. C’est pas grave. On parle de Heavy Metal, tout de même.
Tout à coup, ça démarre. Riff pesant, production pas géniale, mais ce n’est pas l’essentiel. Les harmonies arabisantes se lovent autour de l’auditeur et le compriment, comme un genre de boa. La voix de Robert Lowe, rauque, a quelque chose d’enfantin. Un changement de clé, un jeu à deux voix, c’est trop lourd pour être vraiment beau. Mais pourquoi donc ai-je choisi ce morceau ? Hein ?
Un break, on s’attend à inspirer, mais non. Retour sur ce couplet lourd, lourd, lourd… Pourtant mélodique. On se le coltine à nouveau. Et soudain, la guitare se fait plus claire, sur un enchaînement d’accords simples, et Robert Lowe chante Eternal de sa voix cristalline, dans une mélodie simple qui me fait me sentir m’envoler avec ses notes.
C’est ça qui me fait vibrer. Quelques secondes en suspension avec cette voix si triste et claire.
Puis, le solo en apparence le plus laid de l’histoire de ce genre musical. Mais après pas mal d’écoutes, je le trouve incroyablement bien trouvé, ce solo. Plein de détresse, tordu, oppressant.
Retour au couplet, et Robert s’envole à nouveau dans ce refrain extraordinaire.
Et là survient la perle de ce long monolithe musical : un thème simple autour duquel la deuxième guitare plante des atmosphères lourdes, et Robert Lowe, génial, qui de sa voix naïve et désenchantée s’interroge sur la vacuité de l’existence, dans une envolée que Folon n’aurait pas reniée au moment de mourir.
Mark Levental