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Mamy Blue – Nicoletta

Allez, je me lance dans un deuxième article. Je vais me payer la honte, c’est sûr, moi l’amateur de punk-rock, d’opéra et de Brel. Moi le fan des Kinks, de Slade et des Pink Floyd de l’époque Meddle… Moi qui ai vibré sur Winehouse, Wagner et Charlotte Parfois. Moi qui, moi qui, moi qui, président de la république mettrais quinze heures de musique par semaine dans les écoles primaires et vingt à l’université. Moi, président… Non, c’est pas ça que je dois écrire, c’est sur Mamy Blue de Nicoletta, je crois… Woaaw la référence qui craint, j’espère qu’aucun pote ne lira cet article un jour.

Allez j’avoue, j’avais neuf ans, c’était pas ma faute si je ne savais pas que les « Bitols » et les « Beatles » étaient un seul et même groupe, que les Stones étaient de braves garçons gentils avec leur maman, et que Nicoletta, bon… Mais c’était dans la 2CV de Flavien. Flavien, c’est pas l’empereur, je suis pas si vieux quand même, c’est le père de mon pote de toujours, près de cinquante ans d’amitié, qui dit mieux? On s’est connus tout petits, et on est toujours copains, escaladant tous les sommets de Haute-Savoie dès que l’occasion se présente. On avait donc neuf ans, on était quatre gamins à l’arrière de la 2CV, à l’époque il n’y avait pas de ceintures de sécurité, pas d’ABS pas d’airbag – que l’air con comme dit Geluck –, on allait skier, il y avait la sœur de mon pote, mon pote, ma sœur et moi. On mâchait du chewing-gum pour boucher les trous du toit en tissu souple de la 2CV, une Diane je crois. Il devait y avoir la radio, et c’est là que Mamy Blue intervient. Ça devait être une sorte de tube de l’époque. On était les quatre gamins à chanter et hurler ça sur la banquette arrière. Les parents du pote riaient en nous entendant depuis l’avant. Tout ça était simple, joyeux, on ne connaissait pas encore Guantanamo, l’État islamique, les OGM, Blocher, les dangers du nucléaire. Quarante ans ont passé, et j’ai à nouveau les larmes aux yeux en écoutant ça. En plus les paroles de Nicoletta semblent revenir dans le temps pour redonner vie au jeune homme que je fus, qui parlerait à l’enfant que je ne serai plus jamais non plus :

Je suis parti un soir d’été
(Oh Mamy)
Sans dire un mot, sans t’embrasser
(Oh Mamy)
Sans un regard sur le passé
(Oh Mamy)
Le passé
Dès que j’ai franchi la frontière
(Oh Mamy)
Le vent soufflait plus fort qu’hier

Ainsi va la vie…

Philippe Gobet

Le Coup de soleil – Richard Cocciante

Bien sûr il y a les guerres d’Irlande,

Il y a ces amis, Joe, Jeff, et Gaston qui répond jamais quand je l’appelle, les copains d’abord mais aussi mon vieux, des inconnus parfois, le poinçonneur qui fait des trous et un burn-out, cet Italien qui cherchait des allumettes, l’arabe qui m’a porté sur son dos et l’Auvergnat qui m’a donné du pain; quelques filles également, Paulette et ses mollets d’acier, Roxane qu’éteint jamais la lumière, Mathilde, Madeleine et la Fanette, trois belles salopes, la p’tite mendigote qui fait fuir la peine, la femme qui est dans mon lit enfin pas dans le mien; quelques bestioles encore, le gorille évadé et la Mirza itou, le singe à qui on n’apprend pas à faire la grimace, et ce petit âne gris qui n’en finit pas de mourir au fond d’une étable, j’en pleurerais, d’ailleurs j’en ai pleuré,

Il y a des saisons, parfois il neige en avril et ça me pointille l’âme, un jour en juin et en anglais, l’automne qu’on ramasse à la pelle, et quand tout est ramassé maintenant que vais-je faire?

Il y a des endroits si ancrés en moi, le port d’Amsterdam qui sent la moule et la pisse, la mer du Nord qu’on a pas trop envie d’y aller mais quand même, Vierzon ça fait rêver alors que c’était pas gagné, des pays inconnus au bout de la terre avec des gonzesses à poil qui fleurent la vanille, New York où j’irai un jour, avec toi bien sûr, le p’tit village et son vieux clocher, et le banc où on pourra s’asseoir cinq minutes pour regarder la vie ou la plaine, oh ma plaine, la colline où elle m’a dit d’aller siffler, et nom de bleu la rue d’Carouge, qu’est-ce que c’est beau, et puis Montmartre et ses lilas, et Nantes où il pleut, j’en suis malade, Brest où il pleut aussi décidément alors que moi j’veux du soleil…

Eh bien, ça y est. Je l’ai attrapée, ma plus belle chanson du monde. Mon coup d’soleil. Que tu me joues au piano, chantant de ta douce petite voix toute juste et qui m’étreint le cœur alors je brame faux, par intermittences parce que je me rappelle jamais les paroles. Qu’on entonne en chœur et à tue-tête, ravies comme des midinettes quand elle passe à la radio, en se regardant (au feu rouge) avec plein de choses qu’on se dit avec des yeux brillants comme un ciel d’été.

Alors bien sûr, il y a un fameux trois mâts et un bateau craquant de la coque au pont, mais je préfère encore ce voilier, alors viens ma belle, la mer est calme on peut s’tirer.

Fred Bocquet