Elle m’appelait Sunshine. Ma fille, c’était Ella Bella.
Elle, elle a été là, pendant trente ans.
Et ce 19 décembre, le soleil s’est couché pour ne plus se lever que dans ma mémoire.
Un léger accent allemand. Une mèche qu’elle arrangeait sans cesse sur son front. Son rire et ses pommettes roses quand on buvait un peu trop de pinot. Son écoute attentive, de femme qui n’a pas eu d’enfant et a choisi ceux qu’elle voulait aimer.
Son éternelle jeunesse.
Les articles qu’elle découpait dans les journaux pour me les envoyer, qui étoffaient une discussion qu’on avait eue devant un repas léger parce qu’elle avait un appétit de moineau. Les Lieder de Schubert et le Messiah de Haydn qu’elle m’offrait par tranches, pour ne pas me rassasier.
Ses voyages, ses silences, ses pudeurs, ses blessures et son élégance. Ses indignations et ses générosités.
Ain’t no sunshine anymore.
J’ai perdu tellement plus que cela. Mais c’est déjà beaucoup.
T’as déjà voyagé ? Visité la Louisiane, poussé jusqu’au Mexique ? Laisse-toi entraîner, suis les violons et les guitares. Ça y est, t’as capté le rythme ? Tu galopes sur des terres arides, plantées de cactus. Vois comme l’air vibre à l’horizon. Tu sues sous ton chapeau. Un gars au bord du chemin observe ton passage. Un rai de regard noir, celui de la brute de Sergio Leone, filtre de sous ses paupières. Ne change pas d’allure, reste calme, gringo.
Une voix t’interpelle. Un peu nasillarde, un peu aigre, désabusée, surtout. Elle te raconte une histoire du quotidien, une histoire universelle, de tromperie et de revanche. L’interprète a le cheveu long, la moustache fine, la chemise ouverte. Étrange métissage de pirate, de torero et de crooner, il exsude une séduction un peu repoussante.
Mais ne te laisse pas distraire. Le tempo te reprend, martèle l’allure de ta monture, plante l’atmosphère. De mesure en mesure, la fatalité t’accable autant que la chaleur. Ça sent le drame et la passion, l’air se charge de promesses et de trahisons, comme dans un roman de Steinbeck. Le chanteur te parle de rêves anéantis, de relations qui dévastent, d’une Amérique rurale et cruelle.
Et les violons prennent le relais pour te laisser méditer sur le sens de cette putain de vie.
T’en connais beaucoup, des chansons qui en trois phrases et six accords ont posé le décor ? Ici pas de place pour les tergiversations, tu laves ton honneur dans le sang et tu rinces à la tequila. C’est l’essence même de l’existence : amour, désillusion et vengeance. Fais pas ta mauviette, laisse les sanglots aux trompettes.
Ayayayahahahaa… L’issue était inéluctable, le geste irrémédiable. Entre les cris et les exclamations, la cadence ne faiblit pas. Ton cœur bat au rythme des congas. Ne te retourne pas, cap sur le sud pour une fuite interminable. Galope, gringo, galope, avant qu’on ne te pende. Des gars te regardent passer, des enfants jouent, des femmes s’affairent. File vite vers la frontière dans une traînée de poussière.
Sur un dernier souffle des cuivres, la musique s’interrompt. Tu rouvres des yeux étonnés. Ton cheval, le désert se sont évanouis. Pas le moindre sombrero à l’horizon. Tu retrouves le calme de ton salon, par une maussade soirée de novembre. Tu frissonnes, tu raisonnes. Tu n’as pas commis de meurtre, personne n’est à tes trousses. Pire, tu n’es même pas un homme, bécasse !
Alors n’essaye pas de contester que Hey Joe façonWilly DeVille, ça te transporte vraiment très loin…
Ce morceau-titre du neuvième album studio de Marillion, morceau-fleuve de près de vingt minutes, constitue, non seulement le moment de bravoure des Britanniques mais, et c’est bien cela qui nous importe, une pièce de musique parmi les plus émouvantes du rock du XXe siècle, ni plus ni moins.
Ce long poème autobiographique en prose du chanteur Steve Hogarth (qui a remplacé l’Ecossais Fish en 1989, est-il besoin d’encore le rappeler ?), magnifiquement mis en musique par le Club des cinq, est structuré en plusieurs mouvements, qui suivent sinueusement les aspérités du texte. Certes, l’ensemble pourrait sembler cloner les bases d’un rock progressif honni par l’intelligentsia journalistique qui le croyait relégué dans l’antichambre des mauvais souvenirs issus des seventies. En fait, si certains passages feront immanquablement penser aux ténors du genre (Yes, Genesis et autres Pink Floyd), le tout forme un ensemble tellement cohérent, tenu en grande partie par la puissance évocatrice de la voix du chanteur, probablement l’une des plus belles du rock d’expression anglaise, comme le suggère lui-même le Dictionnaire du rock édité par Michka Assayas dans la collection Bouquins de Robert Laffont. Le guitariste Steve Rothery, impressionnant de retenue, semble faire pleurer son instrument lors de deux soli magistraux qui fonctionnent comme « ponts de ponctuation » liant les différentes séquences. Pour être clair, quitte à rebuter une grande frange du lectorat, jamais David Gilmour (Pink Floyd) ou Steve Hackett (Genesis) ne sont parvenus à ce point de sensibilité, tout en élégance et en mélodie accessible. Écouter, pour s’en convaincre, le passage instrumental démarrant aux alentours des onze minutes. Au casque, les yeux fermés, on quitte le monde. Pour n’y revenir qu’en toute fin de voyage, au moment où le vocaliste se risque à pousser un cri primal du plus étonnant effet.
This Strange Engine, cette étrange machine qu’est le cœur de nos émotions, le centre de réception de tous les sensibles. La messe est dite. D’ailleurs, depuis la parution de ce magnum opus, en 1997, la périphrase utilisée par les mélomanes pour parler du groupe reste « La machine à rêver ». Jetez-y quelques pièces et décollez.
Ça n’est pas que je la préfère, pas que je la revendique, juste qu’elle me fait penser à toi.
Bien sûr, bien sûr qu’elle est parfaite. Qu’elle donne envie de se rouler par terre, de sauter nu sur un piano, de rouler des pelles à plein d’inconnus.
Accessoirement, c’est vrai.
Mais là n’est pas le propos.
Puisque mon propos c’est toi.
Pourtant on l’a écoutée et réécoutée, la voix pleine de gravier d’Amanda, sa grosse bouche, ses sourcils rasés. Elle est vraiment très belle, elle fait franchement flipper. On en a passé des heures devant ton ordi, a écouter toutes les chansons du monde et a remplir des cendriers. Alors pourquoi celle-là ?
Parce que c’est la première.
Et qu’à chaque fois que je l’écoute, je nous revois les deux, tout emmêlés dans nos squelettes encore trop mous pour être adultes. Premier jour d’un voyage de maturité qui, on ne l’a que trop dit, porte bien mal son nom. Les deux coincés sur ce si grand et crasseux bateau. La moquette était pleine de puces et les camionneurs polonais étaient pleins de mauvaises intentions. Nous, discrètement nous avons dérivés à quelques mètres du grand groupe, nous n’étions pas encore amis. C’est quand même absurde de se dire qu’il y a un avant toi.
Tu as mis un écouteur dans ton oreille, j’en ai pris un pour moi. Et puis play, et puis la claque. Mon dieu mais cette chanson ! Elle n’avait pas terminé le premier couplet que c’était déjà ma préférée.
Comme d’habitude, j’ai voulu écouter le début cinq fois de suite. Comme toujours, tu as été d’accord. Et jamais je n’ai trouvé quelqu’un d’autre pour me supporter à ce pointt.
Alors on ne s’est plus lâchés.
On a vidé des canettes à deux francs cinquante avec Tom Waits.
On a cuisiné pour nos amis avec LCD soundsystem.
On a marché avec David Bowie.
On a secoué notre carcasse avec We have band.
On a bien chialé avec Tracy Chapman.
On en a eu marre de Metronomy.
On a voulu grignotter les jambes du chanteur des Horrors.
On s’est tu sur les Bauhaus.
On a pris tout les bus de la campagne avec Jason Webley.
On s’est quand même bien marrés à écouter Céline Dion sur une aire d’autoroute.
On a été bien trop ivres avec She wants revenge.
On a écouté Stevie Wonder avec ta maman.
On a passé un océan avec les Kills.
On a traversé quelques années, qui nous font croire qu’un jour, nous aussi nous serons vieux.
Et de fil en aiguilles on a encore de la peine à croire qu’on s’est tellement bien trouvés qu’on arrive à se construire. On a assisté au défilé des amoureux et des amants, les tiens, les miens, mais dieu merci jamais les mêmes. Et de cuites en ruptures, de cartons et contrats, de tatouages en voyages, d’Usine en excès, et d’angoisses en succès, on ne remerciera jamais assez Amanda de nous avoir présentés.
On ne mesurera jamais vraiment la circonférence de notre amitié.
Au delà de la maitrise absolue de la voix et des instruments, au delà même de l’incroyable synchronisation des différents éléments qui s’assemblent pour constituer le flux de plaisir musical, il y a dans ces notes toute l’Inde, tout un continent qui pleure et qui rit, la magie des couleurs et des rêves de voyages inachevés.
Cette chanson m’a accompagné pendant des décennies, de cassettes en compacts, chaque jour l’envoûtement se distillait dans les oreilles comme la douceur d’un fleuve qui apaise, qui rafraîchit. Chaque jour j’étais comme le Siddhârta : même au cœur des pires souffrances, je trouvais dans ces paroles qui ondulaient vers mon cœur, l’énergie de la longue histoire d’un peuple, d’un mythe sans cesse renouvelé.
Et puis un jour, avec un copain indien, j’ai appris qu’il avait composé ça pour une chaîne de magasins d’habits discount, la très sainte description d’un costard taillé sur mesure avec une cravate offerte si tu achetais des godasses avec.
Je m’en fous, je l’aime toujours comme si c’était le bruit des pas d’une divinité éthérée.
D’abord une entrée de guitare, comme pour accompagner une balade. Puis, de longues notes d’accordéon qui font l’esprit léger, qui vagabonde, comme un oiseau qui s’envole. Ça monte, lentement, puissamment, une longue intro musicale, avec de grands coups d’ailes.
Et, cette voix, qui me soulève le thorax… à chaque fois que je l’entends, je dois poser la main sur ma gorge. Elle parle d’évasion, des prisons qu’on s’est forgées soi-même, de s’en extraire en s’élevant, sans réfléchir, s’envoler, se laisser porter par la vie, le soleil et, peut-être, l’amour… que les autres le comprennent ou non!
Cette chanson me parle, me transporte, m’émeut (surtout aujourd’hui en voyage à l’autre bout du monde) par sa musicalité entraînante, ses paroles, sa voix… Quand je l’écoute, je m’envole… en altitude. Et, tout devient possible!
Alors oui, j’aurais pu parler de tant d’autres chansons, de tant d’autres artistes : c’est qu’ils sont nombreux à se chamailler dans ma caboche pour la première place, la fameuse, celle de la chanson qu’on garde entre toutes, celle dont on choisit de parler au détriment des autres. Georges, Léo, Charles ; ou Wolfgang, ou Kurt, ou Nina, ou même Bob… C’est qu’il m’est difficile de faire le tri entre les belles et la plus belle, parmi toutes ces notes qui m’accompagnèrent et me firent grandir. Mais aujourd’hui, c’est le grand Jacques qui remporte cet insigne honneur, pour sa fabuleuse et gigantesque ode à l’amitié qu’est Jef.
Car oui, quoi qu’on en dise, cette chanson est la plus belle : parce qu’elle raconte simplement, avec douceur et émotion, l’importance de l’ami quand la vie vous joue des vilains tours ; parce qu’elle dessine la faiblesse et sa beauté, parce qu’elle propose des solutions naïves à des problèmes imbéciles, parce qu’elle souligne la victoire de l’espoir sur la tristesse, parce qu’elle… parce qu’elle…
Mais enfin, je ne vais pas non plus tout vous dire, (ré)écoutez-la et vous verrez : dès les premières notes l’ambiance est posée, dès les premiers mots on se sent rempli par la gravité de ce que traverse Jef, par cette tristesse si commune à l’humain et pourtant si intemporelle… Et l’on retient son souffle jusqu’au refrain, qui éclate comme un phare au milieu de la nuit, comme la couleur de l’espoir, alors que toutes les larmes paraissent versées. Ce refrain qui transforme trois sous en repas de fête, qui allume une guitare en guise de voyage, ce refrain qui invite Jef, et qui nous invite à travers lui, et qui nous emporte au loin, sur ce banc, juste au coin de la rue, mais si loin pourtant.
Et l’on vient, comme lui, manger des moules et puis des frites, se réjouir d’un avenir impossible, et l’on recommence à rêver, et l’on recommence à espérer, malgré le temps passé et malgré nos vilaines cicatrices… Et l’on pleure, et l’on rit, et ces contrastes d’émotions qui nous traversent atteignent finalement leur paroxysme sur un simple “ouais”, rempli de la joie de l’ami, le vrai, qui nous voit sortir de la torpeur et se redresser, même provisoirement, pour affronter encore le tumulte de la vie.
J’allais quitter la Guyane, en pleine adolescence, avec toute l’ignorance possible quand au monde extérieur. Le début des années 90 m’avait vu acheter ma première chaîne hi-fi un an auparavant, et le seul compact disque que j’avais était une galette des Platters.
Cette chaîne hi-fi bas de gamme n’avait eu d’intérêt que pour essayer d’attraper une fille, ou l’autre. J’aurais été plus vieux, j’aurais acheté une voiture, Jessie avait bien un scooter, lui.
En attendant, parfois, j’y passais mon disque unique et les compilations de dance music des copains.
À part ça, presque rien. Parfois la musique des voisins, du zouk local, sur une des rares FM que l’on captait, en mode karaoké avec comme interprète leur fille, de mon âge.
Rien d’excitant, vraiment, si ce n’était cette fille.
La musique n’était alors rien d’autre qu’une convention sociale, un peu comme plus tard on fumerait des clopes et boirait des bières.
J’avais bien bouffé un peu de Thiéfaine avec les quelques “grands” qui traînaient dans ce putain de camp militaire où nous vivions, dommages collatéraux des mutations de nos parents.
D’ailleurs, croyez-le ou non, mais les premiers Thiéfaine se prêtent plutôt bien à la mélancolie adolescente qu’on peut ressentir entouré de forêt vierge et éloigné de plus de trente kilomètres de la première “ville”.
Enfin, bref, ce sont mes derniers jours dans ce camp. Je vais “rentrer”, même si on m’embarque pour un endroit que je ne connais pas.
Je vais débarquer ailleurs, bronzé, indolent de mon séjour sous les tropiques. Et aussi innocent qu’un agneau. La veille du départ, Franck, de deux ans plus âgé que moi, me file une cassette repiquée en me disant que “Ça vient de métropole”.
Encore coincé dans l’ingratitude de l’enfance, je ne suis pas sûr d’avoir apprécié le cadeau plus que ça. On m’aurait acheté des magazines pour le voyage que j’aurai été tout aussi enthousiaste.
La baraque est vide, j’embarque dans la 505 break qui doit nous emmener à Cayenne prendre cet avion qui me ramène dans une France inconnue. J’ai un walkman pour tuer le temps sur les 300 bornes de route entourée de vert.
Je regarde le paysage cinq minutes en écoutant Thiéfaine. Puis ça me gave alors je glisse la cassette de Frankie dans le lecteur.
Tindindin dindin din Tindindin dindin din sur une guitare électrique qu’on aurait oublié de brancher, puis une batterie de malade, sauvage, qui me fait sursauter dans mon casque en mousse. Ils découvrent alors l’interrupteur de l’ampli.
TINDINDIN DINDIN DIN TINDINDIN DINDIN DIN
Et moi je découvre la basse. La voix de dépressif par dessus, ou au milieu puis la musique se calme.
Héhé, je m’en doutais, encore un truc triste…
Presque envie de faire une fête avec des amis et des flingues chargés, mais maintenant que j’y suis, j’attends qu’on m’amuse.
Je me dis pourtant que je suis blasé et peut-être trop sûr de moi…
Triste mon cul, j’y comprends rien, mais c’est pas de la tristesse, c’est de la colère, c’est de la colère triste, mais de la colère, c’est la dépression agitée, sauvage, j’y pige vraiment que dalle mais je ne peux que remuer la tête, je panique, c’est ma première fois, et c’est bon.
Je m’agite sur mon siège, avec une envie de hurler. Personne ne comprendrait, donc évidemment, je ferme ma gueule pour ne pas déranger.
La frustration monte, de ne pas pouvoir défoncer les sièges de cette caisse. J’ai l’impression d’être stupide et contagieux.
AWANEUNOW ET MAYTAINERS
ANANAYO ANANYO A MOSKITO
J’essaye de faire un trou dans le plancher en agitant mon pied. J’en ai le duvet des bras qui se dresse, le monde change de couleur, tout s’accélère autour et quelque chose s’agite en moi. Quelque chose qui casse, se recolle. Une envie de me jeter contre les murs. Ma poche à hormones adolescentes doit se déchirer, je crois même que j’ai une érection.
Heureusement qu’ils alternent ces couplets calmes entre le refrain, j’en suis presque à vouloir sauter à la gorge du conducteur, qu’on se plante et que je me mette à courir nu dans la forêt alentour, le casque sur les oreilles et le baladeur à la main.
J’ai écouté cette chanson en boucle au moins cinquante fois ce jour-là. Avec la même impatience à chaque rembobinage.
À ce moment, j’ai compris qu’un extraterrestre s’adressait à moi dans une langue inconnue, qu’il disait ce que j’avais en moi sans que je n’aie ni les mots ni les couilles de l’exprimer, que j’étais coincé dans mon corps de poulpe adolescent, trop grand, trop blond, trop con, trop inexistant.
ET ZELASTA ZTEPEUH.
Je me sentais devenir une part de ce monde, en même temps que me poussaient des poils. Je suis devenu pubère ce jour-là, j’étais sûr de sortir de l’enfance par cette violence musicale, que ce son n’avait qu’un but, foutre en l’air le monde de sucrerie dans lequel je vivais jusqu’ici.
Celui où vivaient les autres, ceux qui n’avaient jamais écouté cette rage.
AWANEUNOW ET MAYTAINERS
ANANAYO ANANYO.
Je venais de découvrir le rock. Plus rien n’avait d’importance. Seule l’absence des titres et des artistes sur le boîtier me contrariait.
Ce morceau m’avait accouché à grands coups de pieds dans le cul, aux forceps. Et en plus m’avait filé une mission, oh, pas une grosse, mais une mission quand même.
On devrait d’ailleurs toujours filer des missions aux nouveau-nés quand on les jette à poil dans le grand bain de la vie. Parce que c’est drôle d’échouer et de prétendre le contraire.
À me pourrir les cervicales en agitant la tête, je savais qu’une fois en métropole je devrais découvrir ce qu’était ce morceau, et aussi d’où il venait.
ANAFORGET VATMECMISMAL
L’arrivée dans la grisaille parisienne ne me choqua pas, j’y avais été préparé par ce que je venais de découvrir.
Six mois plus tard, je mettais un titre sur “Smell Like Teen Spirit” de Nirvana.
Je suis rentré par là. Et étrangement, si j’ai foutu des pans entiers de ma vie à la poubelle, parce qu’ils étaient datés, obsolètes, ou juste parce que je suis con, cette chanson est restée et je la crois toujours capable de sauver des gosses, à défaut de leur éviter une vie de merde.